Le père Georges Carrau est sans doute un de mes meilleurs amis. Nous nous connaissons depuis un demi-siècle. Les chemins de notre amitié vont de ma Pologne natale et suivent les rues, églises, parcs, musées, cimetières et même parfois restaurants de Paris, sa ville. A pied, en conversation, en silence aussi.
Georges est un Parisien, peut-être non pas par naissance, plutôt par la tristesse des circonstances de son enfance.
De neuf ans mon ainé, Georges était enfant unique. Ses parents avaient du mal à affronter l’existence. Quelque fois sa tante lui tenait compagnie, puisque l’on ne peut pas laisser un petit garçon se débrouiller tout seul.
Ainsi, contre la solitude, Georges trouva un remède : connaître Paris. Avec un vieux guide, il parcourrait la cité à pied faute de pouvoir se payer le métro, à l’aide de vieilles cartes il essayait de connaître le monde, seul, de sa chambre, refugié dans ses voyages imaginaires.
D’intenses pensées accompagnaient sans doute les voyages de Georges, en quête de sens. Il avait quinze ans quand une profonde expérience religieuse l’a radicalement changé et l’a dirigé vers le service du Seigneur.
Georges me racontait cela ce vendredi de juillet dans le parc Montsouris vers lequel il a dirigé nos pas pour retrouver les lieux de son enfance. Quelle magnifique illustration de l’amitié qu’il me porte !
J’ai compris qu’il est possible d’aimer les lieux où le temps de jadis était calme, où les arbres ont certes un peu grandi, où de nouvelles sculptures sont certes apparues, mais où les anciennes n’en sont que plus apparentes, où passe la Vie…
Georges aime la vie, et il aime les gens. Tels qu’ils sont avec leurs hauts et leurs bas : il me dit « tel ou tel a fait ce qu’il a pu », et c’est pour moi une des grandes leçons, difficiles…
C’est grâce à Georges que nous avons pu, Anastasia, Matthias et moi, mais aussi Jeanne et Rafael, venir plusieurs fois à Paris, loger dans ses successives paroisses, voir la richesse de sa ville, visiter ses musées, nous promener… et profiter de ses connaissances, de sa riche personnalité…
Merci, cher Parisien, pour ta modestie, ton sens du partage, ta sensibilité aux autres. Encore une fois, j’ai eu la grande chance de te parler de ce qui me touche. Tu m’as écouté, patient et chaleureux comme toujours.
André Bukowski, juillet 2015